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Réaction des Archives de l’État suite au rapport des experts de la Commission Congo

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09/12/2021 - Archives générales du Royaume 2 - dépôt Joseph Cuvelier

Le 22 novembre 2021, les experts de la Commission spéciale chargée d’examiner l’État indépendant du Congo et le passé colonial de la Belgique ont présenté leur rapport aux membres de la Commission spéciale de la Chambre des représentants et au public. Une partie importante de ce rapport aborde la question des archives coloniales et de l’accès à l’information. Il touche de ce fait aux missions essentielles des Archives de l’État et à plusieurs projets en cours au sein de notre institution.

Reconnaissons-le d’emblée, ils ont effectué dans des délais très courts un travail titanesque qui permet de dresser un panorama très complet des questionnements, problèmes et enjeux. Le défi était de taille et les contraintes nombreuses. Le travail de cette large équipe n’a pas échappé à quelques critiques, mais rappelons que les experts, faute de temps, n’ont pas toujours pu introduire toutes les corrections souhaitées, réfléchir ensemble sur chaque volet du rapport ou même relire les traductions.

Une partie importante de ce rapport aborde la question des archives coloniales et de l’accès à l’information. Il touche de ce fait aux missions essentielles des Archives de l’État et à plusieurs projets en cours au sein de notre institution, notamment le transfert des 9,5 km d’archives africaines du SPF Affaires étrangères vers les Archives générales du Royaume et le projet Résolution-Métis.

Le rapport des experts analyse la qualité du service fourni par les Archives de l’État. Il s’appuie entre autres sur l’audition de cinq scientifiques de notre institution, le 19 octobre 2020, par la Commission spéciale de la Chambre des représentants. Les discussions (dont l’enregistrement et la retranscription sont disponibles sur le site de la Chambre des représentants) ont mis en exergue les priorités en matière d’archives coloniales, à savoir : l’accès, la décontamination, la déclassification, la numérisation et le partage. Cette stratégie définie par les Archives de l’État est largement reprise et commentée. Gillian Matthys, chargée de la rédaction de cette partie du rapport, y insiste particulièrement sur la question de l’accès le plus large possible aux archives, dont la déclassification constitue une facette importante. Elle émet aussi le vœu d’un refinancement du secteur des archives qui seul permettra d’offrir un service de qualité à la hauteur des attentes des utilisateurs.

Les experts font également mention du projet « Résolution-Métis », qui a débuté de 1er septembre 2019 au sein des Archives de l’Etat dans le sillage de l’adoption par la Chambre de la "Résolution relative à la ségrégation subie par les métis issus de la colonisation belge en Afrique" (29 mars 2018). Ce vaste projet scindé en deux phases doit, dans un premier temps, répertorier l’ensemble des documents d’archives permettant de documenter les parcours individuels et collectifs des métis issus de la colonisation belge. Dans ce cadre, les chercheurs répondent également aux demandes individuelles de recherche des origines introduites par des métis ou leurs descendants, qu’ils soient en Belgique ou ailleurs. En février 2022, la seconde phase du projet sera lancée, avec pour objectif la réalisation d’une étude historique des pratiques de ségrégation ciblée dont les métis ont été victimes sous le régime de la domination coloniale belge. Contrairement à ce qu’indique le rapport des experts, le projet ne se limite cependant pas aux métis qui ont été déplacés vers la Belgique à l’époque des indépendances, ni à aucun « groupe-cible » en particulier. En effet, conformément aux vœux énoncés dans la Résolution et dans une optique volontairement globale, inclusive et participative, la recherche adopte des cadres chronologique (1885-1980) et géographique étendus. Seule une telle approche permettra de faire toute la lumière sur ce phénomène complexe, qui s’inscrit dans la longue durée et dont de nombreux métis subissent encore actuellement des conséquences très concrètes. Vous trouverez davantage d’informations sur ce projet de recherche sur le site qui y est consacré. L'équipe du projet a récemment créé une exposition virtuelle qui offre un regard, en toute transparence, sur la recherche en cours.

En conclusion, les Archives de l’État se réjouissent que les importants investissements réalisés par l’institution depuis de nombreuses années pour rendre accessibles à tous les archives coloniales portent aujourd’hui leurs fruits : acquisition de kilomètres d’archives, aussi bien publiques que privées ; publication d’instruments de recherche détaillés accessibles en ligne, notamment l’important « Guide des sources de l’histoire de la colonisation » ; mise en ligne d’archives numérisées ; aide à la recherche ; projets de recherche ; projet de partage de patrimoine, en collaboration avec les autorités rwandaises ; communication transparente ; mise en œuvre des recommandations de l’UNESCO et du Conseil international des Archives, etc.

Les archives relatives à la colonisation sont un patrimoine commun, à partager de toute urgence. Elles possèdent un capital historique, mémoriel et symbolique extrêmement fort : non seulement en raison de leur contenu, mais aussi pour ce qu’elles représentent pour la société belge, pour la diaspora africaine, pour les territoires autrefois colonisés, pour les citoyens congolais, rwandais et burundais. Elles ont été un outil de la colonisation. Elles sont aujourd’hui le témoin de ce qu’il s’est passé et doivent constituer un levier de la décolonisation. Les archives coloniales font tout autant partie de l’histoire de la Belgique que de celle du Congo, du Rwanda et du Burundi.

Penser les archives comme un patrimoine commun est un point de départ.  Mais prendre en main la question des archives coloniales, améliorer significativement l’accès, numériser, fournir une réflexion de fond permettant de déconstruire les cadres de pensée hérités de la période coloniale... Rien de tout cela ne peut reposer sur le seul dynamisme d’archivistes engagés. Rien de tout cela ne se fera sans volonté politique et sans moyens supplémentaires, comme le souligne le rapport des experts de la Commission spéciale.

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