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Condamnation pour recel d’archives publiques

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18/06/2025 - Recherche - Gestion d'archives - Acquisitions - Divers

Ce 16 juin 2025, le Tribunal correctionnel de Charleroi a reconnu coupable un receleur d'archives publiques. Il s'agissait de documents datant principalement de l'époque napoléonienne, émanant de hauts fonctionnaires et d'officiers supérieurs. L'enquête menée à la suite d’une plainte des Archives de l'État a nécessité plusieurs perquisitions et de patientes expertises.

L’affaire débute en 2019 quand un archiviste de l’État repère plusieurs documents mis en vente sur un site web spécialisé dans les objets militaires de la Révolution et de l’Empire français.

      

Avec son directeur, ils identifient le vendeur comme étant un retraité basé dans un village de la banlieue de Charleroi. Il est formellement demandé à l’individu de restituer les archives, ce qu’il fera, et de respecter à l’avenir le cadre légal belge et européen qui régit le marché des documents anciens.

Le 15 mars 2021, les Archives constatent que des archives publiques sont à nouveau en vente sur le même site internet. Plus grave, le vendeur a développé son activité et met également en vente de nombreuses pièces appartenant à plusieurs pays dont la France. De plus, il est identifié comme étant le propriétaire de plusieurs comptes sur des sites de ventes aux enchères, qu’il utilise pour écouler des milliers de documents dans le monde entier. Sa présence sur des brocantes et bourses spécialisées dans le souvenir napoléonien est également attestée. Ces éléments permettent d’établir que l’individu est un des plus importants receleurs de documents napoléoniens sur le territoire belge. Les Archives de l’État décident dès lors d’entamer une procédure judiciaire.

La police met peu de temps à réagir : une visite domiciliaire est organisée en mars 2021. Des archivistes sont désignés comme experts et accompagnent les enquêteurs. Sur place, des centaines de documents publics, devant principalement revenir à la France, sont saisis.

Suite à cette opération de police, contact est pris avec le Service interministériel des Archives de France, le Service Historique de la Défense et les Affaires étrangères. L’État français décide de porter plainte à son tour.

Le 21 novembre 2021, une nouvelle opération est menée conjointement par la police de Braine-l’Alleud (Waterloo) et les Archives de l’État dans une bourse d’objets militaires où est annoncée la vente d’archives. Plusieurs vendeurs sont interceptés par la brigade judiciaire. Les pièces sont expertisées sur place par des archivistes de l’État. Ils y trouvent notamment des documents de la campagne d’Égypte ainsi que des documents de la main de généraux de Napoléon.

En mai 2022, l’intéressé, loin de s’amender, invite même la presse locale (La Nouvelle Gazette) ainsi que la télévision nationale (RTBF) pour dénoncer ce qu’il considère comme une cabale orchestrée par les Archives de l’État à son encontre. L’individu pousse l’audace jusqu’à se laisser prendre en photo avec entre les mains un document public destiné à un ministre de l’Empire. Vu la tournure des événements, les Archives décident de porter l’affaire devant le juge d’instruction et font verser la coupure de presse au dossier.

Ce nouveau rebondissement vaut à l’intéressé une nouvelle perquisition de son domicile en mars 2023. D’autres documents publics sont identifiés, dont un document signé de la main de Napoléon.

Au total, la Justice estime que le coupable s’est enrichi de près de 100.000 € grâce au recel. Il s’agissait notamment de lettres adressées à des fonctionnaires ou des militaires durant l’époque napoléonienne.

Le jugement

Dans son jugement, le Tribunal rappelle que les archives qualifiées de publiques sont soumises à des règles strictes qui reflètent leur caractère atypique : elles sont « hors commerce » et ne peuvent être données ; elles sont incessibles et imprescriptibles.

Une archive venant d’une autorité publique et adressée à une autre autorité publique est incontestablement une archive publique (conformément à la loi relative aux archives du 24 juin 1955 et à l’arrêté royal du 18 août 2010 portant exécution des articles 1er, 5 et 6 bis de la loi du 24 juin 1955 relative aux archives). Néanmoins, un document d’origine privée peut également être confié aux Archives de l’État et devenir une archive publique, conformément à la loi.

Pour rappel, les services des Archives de l'État permettent à toute personne de s’y rendre et de consulter des documents ; malheureusement ceux-ci sont souvent la proie de personnes peu scrupuleuses qui souhaitent obtenir de l’argent en les dérobant et en les revendant. Mais même si des documents d’archives publics n’ont jamais été déposés aux Archives, leur possession est illicite.

Dans le cas d’espèce, le prévenu savait ou ne pouvait ignorer que les archives avaient une origine illicite et que les objets dont il a eu la possession ou la détention ont été obtenus à l’aide d’un crime ou d’un délit. Le moyen de défense selon lequel il aurait obtenu certaines pièces lors de ventes tenues par des commissaires-priseurs est, au vu du caractère public des archives et de leur inaccessibilité et imprescriptibilité, non recevable.

Questions ?

La simple détention d’archives publiques est illicite. Leur commerce constitue un délit de recel. En cas de doute, n’hésitez pas à contacter les Archives de l’État de votre région.

Pour des questions plus générales, vous pouvez vous adresser à Bernard Wilkin ou à Sébastien Dubois.

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